On peut lire ?

Recueil de textes préfacé par François Morel (150 pages).
On peut le commander à :

Bernard Joyet
7, rue du Parc Sage
44420 LA TURBALLE

Chèque de 20€ à l’ordre de Bernard Joyet + timbre <500g

Recueil de textes préfacé par Juliette (150 pages).
On peut le commander à :

Bernard Joyet
7, rue du Parc Sage
44420 LA TURBALLE

Chèque de 20€ à l’ordre de Bernard Joyet + timbre <500g

Le Gérontophile

Certains de nos congénères
Ont la manie bien singulière
De tomber bêt’ment amoureux
De plus jeun’s qu’eux…
Quelques dangereux maniaques
Guident leurs ardeurs démoniaques
Vers les tendrons les jouvencelles
Et les pucelles…
Gamines, nubiles, novices
Sont l’objet de leurs sévices;
Ils font la sortie des lycées,
C’est insensé!

 

Cette irréparable offense
À la pureté de l’enfance,
Perpétrée par ces renégats
Fait du dégât…
Ce genre d’enfantillage,
C’est le doigt dans un engrenage…
Vis à vis du code pénal
Ça peut fair’ mal…
De ce côté je suis tranquille,
Car moi je suis gérontophile:
La bonn’soupe est dans les vieux pots,
C’est mon topo!

 

 

Viens m ‘aimer mémé, viens mémère!
Le temps fait du bien à l’affaire!
J’aim’ ce grain d’sel dans tes cheveux!
Un petit examen s’impose:
Mignonne allons voir si l’arthrose
A point d’effets libidineux!

 

J’aim’ les doyenn’s, et les douairières,
Et les grisonn’s, et les rombières,
Les femmes d’académiciens,
J’fais dans l’ancien…
Maisons de retraite, hospices,
Voilà des endroits propices:
On n’a qu’à l’ver le petit doigt,
On a le choix…
J’aurais, d’après les psychologues,
L’obsession de l’archéologue,
Le complexe du reliquaire,
De l’antiquaire…

 

Dans les cimetièr’s, il y a des veuves,
Presque fraîches, presque neuves,
Qui tomb’raient la culott’ de deuil
En un clin d’oeil!
Tant de soldats morts en campagne
Ont abandonné leurs compagnes
En panne sur la page trois
Du Kamasoutra…
Celles-là ne demandent qu’à nous suivre
Histoire de compulser le livre,
De l’dévorer jusqu’à plus faim,
Jusqu’au mot FIN…

 

 

Vivez, prenez de la bouteille,
Rev’nez quand vous serez bien vieille,
Ridée, décrépite, édentée,
Ça peut m’tenter…
La muette amplifie le geste
Pour montrer qu’elle a de beaux restes,
Et la sourde crie bien plus fort:
Encore, encore!
Madame, quel désir vous agite?
C’est le diable qui vous excite?
Non monsieur ce corps qui frissonne,
C’est Parlkinson…

 

Parfois ma déraison s’égare:
Je rêve de la perle rare
Qui aurait connu la maman
De Jeanne Calmant…

Djamila

C’est comme une vision divine, radieuse,
Une surimpression qui s’ajoute au tableau:
Ta silhouette est là, embrumée d’un halo,
Comme on voyait jadis sur les images pieuses…

 

Paraît que Djamila, ça signifie “La Belle”:
Limpide traduction, pléonasme élégant!
Le thème ou la version, ça te va comme un gant:
La belle, Djamila, Djamila, la rebelle….
Aux sous-sols d’El Biar ils traînaient leurs captures;
On surnommait aussi l’endroit : Centre de Tri.
Quelques soldats chantaient pour étouffer les cris
De ceux qu’on remontait, meurtris par la torture.
Ceux qui t’ont abîmée de manière indicible,
Tu les reconnaîtrais sur la moindre photo,
Mais le juge impartial te demande plutôt
De délivrer leurs noms, la Cour est impassible…

 

DJAMILA

 

On fait taire les voix, on censure les lignes
De Sagan, Signoret, Halimi, De Beauvoir
Ou Germaine Tillion, dont le crime est
d’avoir
Dénoncé haut et fort ces pratiques indignes…
On t’éloigne d’Alger, on se voile la face…
Au-delà de la mer, loin du cœur, loin des yeux…
De Barberousse à Pau , et de Fresnes à Lisieux
Croit-on qu’en voyageant le souvenir s’efface?
On te libère enfin, au seuil de la victoire…
Mais, dès le lendemain du grand référendum,
Les hommes te prieront de quitter le forum,
Comme s’ils étaient seuls à écrire l’histoire…

 

DJAMILA

 

Madame à la maison, Monsieur gagne la guerre;
Tout sera comme avant selon l’ordre établi…
Elle aura des petits, dans l’ombre et dans l’oubli…
Qu’importent les combats qu’elle entreprit naguère.
Que sont ils devenus, bourreaux et tortionnaires?
Joyeux drille? artisan? notable? intelligent?
Médecin réputé? arbitre intransigeant?
Ou grand-père idéal? amnésique ordinaire?
Je pense à leurs enfants. Le mal que je leur souhaite
C’est d’avoir dans l’esprit, loin de ces philistins,
Plein d’espoir et d’envie de changer le destin,
La soif de devenir utopistes, poètes…

 

DJAMILA

 

…Que leur chant jusqu’à toi déchire le silence
Pour apaiser un peu l’inusable douleur …
… Que mon chant jusqu’à toi déchire le silence
Pour apaiser un peu l’inusable douleur …
C’est comme une vision divine, radieuse,
Une surimpression qui s’ajoute au tableau:
Ta silhouette est là, embrumée d’un halo,
Comme on voyait jadis sur les images pieuses…

Presque

À l’horizon tremblant ivre de kérosène
Dans les herbes d’Orly je rêve ton pays
Les larmes plein le sud à deux ailes d’ici
Où vont ces oiseaux nus les filandres qu’ils traînent
Je t’invente un prénom de princesse mauresque
Je t’aime je t’aime je t’aime je t’aime presque

 

Pour percer le mystère on s’approche et on louche
Sur la main qui menait Monet parmi les dieux
On voit les Nymphéas qui clignotent des yeux
On se recule un peu pour croire qu’on les touche
Je brûle de savoir m’éloigner de la fresque
Je t’aime je t’aime je t’aime je t’aime presque

 

L’automne fout le feu aux arbres qui me cueillent
Je maquille mes cils aux caprices du vent
Esquissant un salut d’un chapeau titubant
J’effleure d’un frisson le froissement des feuilles
Je t’esquive d’un rien d’un revers chaplinesque
Je t’aime je t’aime je t’aime je t’aime presque

 

Il s’en faut d’un cheveu que tes cheveux m’enlacent
Un talon qui se brise un bagage tombé
Une poussière à l’œil un café dérobé
Un petit pas de trop perdu dans Montparnasse
Mais je balbutierai quelque phrase grotesque
Je t’aime je t’aime je t’aime je t’aime presque

 

Tes mots qui vont à l’autre en me frôlant à peine
Ta joue qui sait le creux qu’attend mon oreiller
Ton sourire évité de peu juste à côté
Ton regard sur mon ombre à l’affût de la tienne
Le flou d’Isadora dans ta robe arabesque
Tu m’aimes tu m’aimes tu m’aimes presque

Mayerling

Tu jubiles sous le déluge
Je me noie sous deux gouttes d’eau
Tu dis que Venise est à Bruges
Je dis que Londres est à Bordeaux
Sur l’art de refaire le monde
Le désaccord est immédiat
Notre mésentente est profonde
L’un est à hue et l’autre à dia

Nos divergences sont si pures
Et nos conflits si généreux
Vivons ensemble et je te jure
Que nous serons très malheureux

Toujours pressé tu fais la course
Sans crier gare montre en main
Je m’attarde sur la Grande Ourse
Je musarde sur le chemin
En bonne mésintelligence
Nous marchons à pas inégaux
Désunis jusque dans la danse
Tu es valse et je suis tango

Nos divergences sont si pures
Et nos conflits si généreux
Vivons ensemble et je te jure
Que nous serons très malheureux

Pour éviter toute harmonie
Soignons notre jardin secret
Semons un peu de zizanie
Voici quelques graines d’ivraie
Croquons la pomme de discorde
Cherchons quatorze heures à midi
Sur la Place de la Concorde
Empruntons les sens interdits

Nos divergences sont si pures
Et nos conflits si généreux
Vivons ensemble et je te jure
Que nous serons très malheureux

Quand tu auras cessé de feindre
De ne pas avoir lu ces lignes
Je t’en supplie viens me rejoindre
C’est trop gai sans toi Mayerling